La mine Opémiska et son village : l'éveil de Chapais
Au début du siècle dernier, d’après des relevés géologiques, des traces de cuivre sont découvertes dans le sol. Selon deux versions distinctes mais semblant se chevaucher dans le fil du temps, l’une impliquant Léo Springer et son pilote d’hydravion mentionne une crête de rochers noircis par un feu de forêt et l’autre signale une roche récoltée par Charles A. Dixon sur son terrain de chasse. L’exploration d’un gisement de cuivre est lancée vers 1929. Aidé de Jos Perry et de Gaston Robitaille, le prospecteur Léo Springer ramasse des échantillons plus que prometteurs.
Crédit photo: Archives de Chapais
Crédit photo: Lionel Francoeur
Dès 1936, une compagnie minière s’occupe de forer, mais des ennuis s’annoncent (chute du prix du cuivre et inexistence d’une route) et auront raison de son retrait. Ce n’est qu’en 1951, que l’Opémiska Copper Mines Ltd reprend les activités. Le prix du cuivre et une route reliant le LacSaint-Jean et Chibougamau sont des incitatifs probants. La compagnie fait construire des maisons pour les familles et des dortoirs pour les travailleurs seuls.
En 1953, les premières familles s’installent et Yvonne Francoeur ouvre une petite école qui servira aussi pour les cérémonies religieuses.
Crédit photo: Lionel Francoeur
En 1955, en l’honneur de Thomas Chapais, politicien et historien, on changera le nom du village Opémiska. Des maisons seront déménagées sur le nouveau site de la ville de Chapais et la mine Opémiska restera le principal employeur jusqu’en 1992. Aujourd’hui, en 2024, Qc Copper & Gold projette d’y créer une mine à ciel ouvert.
Crédit photo: Archives de Chapais
La mine Opémiska et son village : L'éveil de Chapais, 50.8 x 40.6 cm, Vitrail Tiffany, verre fusion, 2024 Crédit photo : Guy Tremblay
Inaugurant l’histoire de ma série, ce vitrail déploie, à travers ses lignes et ses couleurs, l'histoire d'un village devenu Chapais, entrelaçant mon récit personnel à celui d'une communauté enracinée par la mine.
Mon père, quittant Chibougamau pour travailler à la mine
au milieu des années 60, a planté le décor de notre
vie familiale à Chapais.
Captivée par les récits des origines de ce lieu, c'est avec
Lionel que je plonge dans le passé, lui qui a été témoin de l'aube de cette époque. C'est le 15 août 1953 que Lionel,
avec sa famille, va à la rencontre du village et de la mine Opémiska pour rejoindre son père, mineur.
La famille emménage dans un des duplex du village, ces maisons qui allaient plus tard migrer à Chapais. Lionel,
avec ses souvenirs intacts, se rappelle le chemin initial
vers la mine, là où est aujourd’hui le boulevard Springer.
La première école, bâtie par la mine, est rapidement
devenue le royaume de Mme Francoeur, la mère de Lionel.
Elle en prend les rênes pour la rentrée de 1953, dispensant
le savoir aux enfants de la 1ère à la 7e année, sans égard
à la langue ou à la foi.
Et c'est dans cette humble salle que s'est tenue la toute première messe de minuit en 1953, avec Lionel et Wayne
en servants de messe. On se demande si Lionel n'est pas,
à ce jour, le plus ancien gardien des souvenirs
d'Opémiska à Chapais.
Jocelyne
De pierres et de glace, le voyage du curling Opémiska
Le club de curling Opémiska est né un peu avant la ville de Chapais. Dès 1952, il accueillera les sportifs et servira de centre social. À une patinoire extérieure s’ajouteront des activités comme le cinéma, une salle pour les mariages,
une discothèque, de nombreux soupers spaghetti,
un fort Boyard, etc…
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Crédit photo : Archives de Chapais
Bref, c’est un lieu incontournable de rassemblement. Faute d’assurer la sécurité du lieu, il ferme ses portes
en 2010 pour les rouvrir en 2011, annexé cette fois à
l’aréna et à la salle communautaire à même le
centre sportif de Chapais.
De deux glaces, il passera à trois et offrira aussi un lounge. L’association toujours en fonction a étendu ses opérations. Plusieurs tournois (funspiels) s’y jouent et des équipes de calibre professionnel se démarquent allant même jusqu’aux Jeux du Québec et au Championnat canadien junior.
Crédit photo : Archives de Chapais
Crédit photo : Jocelyne Grondin
Deux jeunes femmes de Chapais font partie de l’équipe régionale Riverbend Opémiska. À Chapais, on peut dire que l’on a le curling tatoué sur le cœur.
De pierres et de glace, le voyage du curling Opoémiska, 50.8 x 40.6 cm, Vitrail Tiffany, verre fusion, 2024 Crédit photo : Guy Tremblay
Ce vitrail, second de ma série « Histoires d’Opémiska »,
célèbre l'essence du curling, profondément ancré dans le cœur de notre communauté de Chapais.
Je me remémore avec tendresse le moment où mon père, paré de son gilet de laine dédié au curling, réagissait avec
son patois unique à une farce familiale, juste avant de
quitter la maison pour une partie, le jour de son
anniversaire, un 1er avril.
Je garde également en mémoire mes premiers tournois
de fin de semaine et de nos belles discussions autour
d’un plat de spaghettis et de pain exquis préparés par
Thérèse et Claudio, dignes successeurs d’autres
cuisiniers tout aussi talentueux.
On raconte que, alors que Denis prêtait main-forte à sa
mère à la cantine, il manifesta son désir de jouer au curling. Confronté au refus des membres du club, sa mère,
Mme Crépeault, reconnue pour son caractère et ses
burgers exceptionnels, menaça de fermer la cantine
et de repartir avec ses burgers si son fils se voyait
refuser l'accès au jeu.
Les burgers de Mme Crépeault étant indispensables,
Denis pourrait-il avoir marqué le début d'une ère nouvelle d'inclusivité en devenant le premier joueur ne venant pas d'une famille de mineurs ? La véracité de cette histoire
reste incertaine, j'y ai peut-être ajouté une touche personnelle, tant elle est inspirante.
Cette œuvre rend hommage à la tradition ancrée dans la communauté de Chapais, faisant écho à la fois à l'ancien
et au nouveau bâtiment du curling, et célébrant le présent comme l'avenir de l'Opémiska.
Avec la pierre de curling mise en vitrail, je salue les fervents curleurs qui préservent ce patrimoine vivant, assurant ainsi
la continuité des traditions et préparant la relève.
Jocelyne
Le club Opémiska
La minière Opémiska a le souci de la vie récréative des habitants de Chapais. Elle s’active dès 1957 à créer un centre récréatif qui sera fonctionnel jusqu’en 1980.
Les Chapaisiens et Chapaisiennes se reconnaissent dans les rencontres sociales (soirées dansantes, bingos, réunions syndicales, cérémonies religieuses, soirées récréatives, mariages, spectacles, films, etc.). On y pratique aussi le badminton, le tennis de table et le basketball.
Crédit photo : Archives de Chapais
De 1972 jusqu’à 1976, le club accueillera les élèves pour les cours d’éducation physique en attendant la fin de la construction d’une polyvalente en 1977.
Crédit photo : Archives de Chapais
Tout s’est arrêté en 1980. Encore à ce jour, il peut être difficile pour plusieurs d’en parler ou d’en entendre parler. Quarante-neuf plumes s’envolant vers le ciel et un arbre de vie bourgeonnant illustrent la douleur passée et présente. L’Homme est comme la nature :
il reprend graduellement vie et espoir… à son rythme.
Crédit photo : Archives de Chapais
Crédit photo : Steeve Mercier
On n’oubliera jamais.
Le club Opémiska, , 50.8 x 40.6 cm, Vitrail Tiffany, verre fusion, 2024 Crédit photo : Guy Tremblay
Le Club Opémiska est ancré dans les premières pages de l’histoire de Chapais. Il a marqué nos vies bien au-delà des activités qu’il accueillait.
Dans ce vitrail, j’ai voulu exprimer non seulement mes souvenirs d’étudiante faisant le court trajet depuis le couvent pour des cours d’éducation physique, mais aussi l’esprit de rencontre et de communauté qu’il incarnait.
Créer ce vitrail n’a pas été facile, mais il m’était nécessaire.
Je voulais qu’il soit le reflet d’une histoire partagée, empreinte de moments inoubliables et d’une multitude d’émotions.
Ce vitrail est une fenêtre ouverte sur le passé, capturant
les instants de célébration, et il incarne également l’espoir
et la capacité d'aller de l'avant, honorant ceux du passé et
du présent. Dans chaque morceau de verre, je dépose mon respect pour notre patrimoine, et j'espère offrir un lieu
de recueillement pour que chacun puisse y retrouver
ses propres résonances.
C’est une œuvre qui, bien que discrète dans sa narration, s’exprime à travers le silence.
Jocelyne
Le parc de la Chute : Héritage de Léo Springer
Selon l’histoire reconnue, Léo Springer a découvert le 1er gisement de cuivre en surface. Un shaft ou puits est alors élevé et, suite à sa destruction par un incendie, un nouveau puits - Springer II - sera rapidement construit. En 1957, on installera un monument rendant hommage à ce pionnier.
P48,S5,F6,0011 - 1 Société d'histoire de la Baie-James
Crédit photo : Jocelyne Grondin
La mine ayant cessé ses activités en 1992, la Ville y installera dès 2000 le parc de la Chute, entre le monument et l’ancien emplacement du shaft. L’eau qui y circule provient de la mine jusqu’alors souterraine. Grâce à une monterie de ventilation, l’eau qui est sous la nappe phréatique, subissant une pression artésienne, s’écoule dans le parc.
Puis l’ancienne maison du directeur, sise au pied de la
mine, sera transformée plus tard en un restaurant, le Château de la montagne. Régulièrement, la Ville de Chapais ensemence de truites ce réservoir afin que les citoyens y pratiquent une activité courue : la Relève de la pêche.
Crédit photo : Jocelyne Grondin
Crédit photo : Jocelyne Grondin
Ce lieu idyllique permet de concrétiser des évènements heureux : prise de photos de mariage, pique-nique familial, rencontre amicale, arrêt avant de reprendre la marche, etc… Ce parc perpétue une épopée importante de l’histoire
de Chapais. C’est une façon de garder bien vivant cet
apport qui a changé leur quotidien.
Le parc de la Chute : Héritage de Léo Springer , 50.8 x 40.6 cm, Vitrail Tiffany, verre fusion, 2024 Crédit photo : Guy Tremblay
La série « Histoires d'Opémiska » s'enrichit de sa quatrième œuvre en vitrail. Cette œuvre veut rester vivante dans
mon cœur.
Le Parc de la chute, véritable trésor de notre communauté, est un legs de la mine Opémiska. Il représente pour moi
et pour tant d’autres, un véritable joyau.
Les échos des chiens de traîneaux, tout près de la « maison du directeur » déjà transformée en un autre lieu,
résonnent dans ma mémoire, rappelant l'époque où
mon fils, animé d'innocence, s'en occupait avec
l'ardeur d'une espérance enfantine.
Ce lieu est à la fois reflet de notre héritage et témoin
de tant de moments où, malgré la distance imposée par
le covid, les familles se rassemblaient, dans la joie ou
dans le deuil. C'était le cas lors du décès de mon père,
où le parc est devenu notre lieu de rassemblement, empreint de retrouvailles et de nostalgie.
J'entretiens l'espoir que, même en cas de transformation, ce lieu renaîtra sous une autre forme, emportant avec
lui des morceaux de notre histoire commune.
Jocelyne
Lac et mont Opémisca : La momie, gardienne du lac
Les eaux de cet immense lac, le lac Opémisca, prennent leur source dans la rivière Chibougamau et y retournent après de multiples détours. Au loin, on distingue la montagne de la momie (nom donnée affectueusement au mont Opémisca) qui semble veiller sur les pêcheurs.
À l’époque, c’est ici que Léo Springer y a posé son hydravion pour y effectuer des travaux de prospection. Pour favoriser l’accessibilité à ses rives dépourvues de chemin, en 1960, on a construit une verchère (bateau à fond plat de bonne envergure).
Crédit photo : Régis Vézina
Crédit photo : Lionel Francoeur
Depuis, sur ses berges, à environ dix kilomètres de la ville de Chapais, on y retrouve un terrain de camping très fréquenté avec rampe de mise à l’eau et station pour arranger le poisson (le camping Opémiska), un tournoi
de pêche très couru (le Festival du doré Baie-James),
la communauté crie d’Oujé-Bougoumou et son
architecture traditionnelle, des dizaines de résidences permanentes et/ou estivales, des pistes de ski de fond, raquette et motoneige pour agrémenter les journées d’hiver ainsi qu’un sentier cyclable reliant Chapais et le lac.
Crédit photo : Régis Vézina
C’est un endroit rêvé pour côtoyer la nature, se ressourcer et y vivre des activités au grand air.
Crédit photo : Régis Vézina
Lac et mont Opémisca: La momie, gardienne du lac , 50.8 x 40.6 cm, Vitrail Tiffany, verre fusion, 2024 Crédit photo : Guy Tremblay
Dans mon exploration de l'histoire locale, j'ai appris que
le mont Opémisca était aussi connu sous le nom de la montagne de la momie. Au-delà de cette appellation,
la montagne a une présence indéniable qui se reflète
dans les nombreuses photographies et œuvres d'art
qu'elle a inspirées.
Visible depuis le débarcadère et le camping, elle est un
point de repère constant pour les pêcheurs et les
résidents de la région.
C'est aux pieds de ce mont que les pêcheurs se réunissent, attirés par la tranquillité et la protection qu'elle semble offrir. L'arbre penché est un autre de ces lieux symboliques,
un endroit de convergence pour la pêche et la réflexion personnelle, malgré l'ambiguïté de son emplacement réel.
Mes souvenirs d'enfance du lac Opémisca sont ponctués
par les baignades, les camps d'été et les randonnées
de ski en famille. La mémoire de ces jours passés près
de cet endroit magnifique me reste précieuse.
Avec l'arrivée de juin, la vie au lac Opémisca gagne en effervescence. Les résidences d'été s'animent, les
amateurs de pêche se préparent pour le festival, et
la promenade sur le lac devient une activité des plus agréables. Les longues journées d'été, où le jour dure tellement plus longtemps que la nuit, apportent un
rythme différent à la vie au bord de l'eau, influençant subtilement l'ambiance et l'inspiration artistique.
Jocelyne
Soleil couchant sur mon Opémisca
J’étais encore jeune et déjà ce lieu, le lac Opémisca, m’attirait.
En 2006, nous avons acquis, mon conjoint et moi, un bout de terrain. Mais c’est en 2011 que notre rêve se réalisera : on déménage la maison sur les rives du lac.
Crédit photo : Régis Vézina
Crédit photo : Régis Vézina
Crédit photo : Régis Vézina
Crédit photo : Régis Vézina
Toutes les saisons nous offrent des décors magnifiques et les couchers de soleil y sont les plus beaux du monde. S’installer dans la balançoire, écouter les vagues venir s’assoupir sur la plage, prêter attention au chant des oiseaux, tous ces moments sont empreints de sérénité et d’une grande paix. Que de beaux souvenirs en perspective pour les enfants et petits-enfants!
Les visiteurs y sont nombreux : petits oiseaux, perdrix, pygargues, écureuils, suisses, renards, hermines et d’autres que l’on préfère regarder de loin. Dès que le printemps
se pointe, un rituel quotidien s’installe : mettre les pieds
à l’eau et profiter d’une marche en soirée, et ce,
jusque tard en automne.
Et le bonheur d’y habiter s’exprime ainsi : « Quand je pars d’ici, je roule très lentement, car c’est difficile de quitter
ce lieu magique. Lorsque je reviens, je roule vite
avec la hâte d’y revenir. »
Les textes historiques ont été écrits par Anne-Marie Allard et Guy Lalancette à partir des données fournies par Jocelyne Grondin
Soleil couchant sur mon Opémisca , 50.8 x 40.6 cm, Vitrail Tiffany, verre fusion, 2024 Crédit photo : Guy Tremblay
La réalisation de ce dernier vitrail clôt ma série « Histoires d’Opémiska ». Imprégnée de la paix des premiers jours
en ce lieu, cette pièce évoque nos promenades le long de la rive, où nous imaginions l'avenir et les souvenirs à créer.
Ces moments espérés se sont concrétisés : les étés furent remplis des rires de nos petites-filles jouant sur la plage,
et je nourris l'espoir que ces instants de bonheur perdurent.
Dans mon atelier, où la fenêtre ajustée offre une vue splendide, je me laisse guider par ce décor pour capturer
plus qu'une image : c'est le témoignage du passage du
temps et des saisons au bord de l'Opémisca. Les couchers
de soleil, immortalisés dans le verre, deviennent les
archives de notre vie paisible là-bas.
Cette œuvre capture une part de cette tranquillité, un
calme qui va au-delà de la simple représentation pour se fondre dans l'essence de notre maison. Elle transcende
le reflet
des couleurs du crépuscule pour offrir une ouverture sur notre vie paisible, en parfaite harmonie avec la nature et
le lac que nous chérissons tant.
À travers ce vitrail, je préserve un fragment de cette
sérénité, une quiétude qui dépasse le spectacle visuel
pour devenir une composante tangible de notre foyer.
Plus qu'un miroir des teintes du soir, c'est une fenêtre
sur notre existence apaisée, en union avec la nature et
le lac que nous aimons profondément.
Jocelyne